Le film : « Dien Bien Phu »
Affiche du film de P. Schœndœrffer « Dien Bien Phu » et couverture du livre « Dien Bien Phu, de la bataille au film »
En Indochine, le 13 mars 1954, l’armée française attend de pied ferme l’ennemi viêt-minh dans la vallée de Diên Biên Phû. Dans un bar de Hanoï, Simpson, un journaliste américain, retrouve un ancien ami, le capitaine de Kervéguen, en compagnie de sa cousine, la violoniste Béatrice Vergnes.
À minuit, on annonce que le Viêt-minh a pris l’une des collines entourant Diên Biên Phû. Kervéguen et ses camarades sont appelés d’urgence pour être largués au-dessus de la cuvette. Les hommes sont admirables de courage, mais cela ne suffit pas. L’ennemi est le plus fort et fait tomber les positions une à une. Les blessés s’accumulent. La défaite semble inévitable…
Tournage du film « Dien Bien Phu »
Le réalisateur : Pierre Schœndœrffer
Pierre Schœndœffer est un jeune alsacien de 17 ans à la fin de la seconde guerre mondiale. Ses lectures pendant les années terribles de l’occupation ont été un refuge et lui ont donné le goût du grand large.
À 19 ans, il s’embarque comme matelot de pont léger sur un cargo suédois. Mais les rêves que lui ont insufflés Conrad, Kessel et Kipling sont plus forts que tout. Il voudrait être témoin, partager et faire partager l’aventure épique des hommes du XXe siècle.
À 23 ans, il se porte volontaire et s’engage au service cinéma des armées pour partir en Indochine. Cette expérience va le marquer à jamais. Parachuté à Diên Biên Phu, il sera ensuite fait prisonnier par le Vietminh ainsi que toute la garnison.
Libéré par les accords de Genève, il décide de ne rentrer en France qu’après avoir bouclé le tour du monde, avec, cette fois, une accréditation de photographe pour Match, Life, Look et Bunte en poche.
Akira Kurosawa l’invite sur le tournage du Château de l’araignée au Japon. A Hollywood, il est engagé comme consultant sur un film de guerre. Mais surtout à Hong Kong, il fait la connaissance de Joseph Kessel qui lui promet de l’aider à mettre en scène son premier film de fiction. Il l’impose comme metteur en scène pour La Passe du diable, un western antique dans les déserts montagneux d’Afghanistan. Suivront d’autres films, la 317e section, adaptée de son roman du même nom.
Il passera régulièrement du cinéma à la littérature, sans jamais oublier le reportage, recherchant sans cesse des moyens narratifs différents.
Entres autres récompenses, il reçoit, le prix Vauban en 1984 pour l’ensemble de son oeuvre.
En 1988, il est élu à l’Institut de France – Académie des Beaux-Arts. En 1992 avec le film Diên Biên Phu, il clôt sa trilogie indochinoise.
En 2007, invité par le 1er régiment de chasseurs parachutistes (1er RCP), dont il est soldat de 1re classe d’honneur, il se rend en Afghanistan, un demi-siècle après avoir découvert le pays aux côtés de Joseph Kessel.
Pierre Schœndœrffer meurt le 14 mars 2012 à l’hôpital militaire Percy de Clamart où il avait été transféré quelques jours auparavant à la suite d’une opération chirurgicale. Le 19 mars, jour anniversaire de son parachutage à Diên Biên Phu, ses obsèques sont célébrées en la cathédrale Saint-Louis-des-Invalides à Paris, suivies d’un hommage national dans la cour d’honneur des Invalides.
Source site ministère de la défense.
Pourquoi je vous conseille ce film ?
Je vais juste reprendre les mots de S Boisse qui les a écrits sur le site Sens critique.
Le piège, l’honneur et la camaraderie
Caméraman au Service cinématographique des armées, Pierre Schoendoerffer y était. Trente-huit ans, il a porté, en lui, ce film. Il tenait à le tourner sur place. Il l’a fait. Les anciens belligérants ont fourni les figurants. Vous connaissez l’histoire : le Corps expéditionnaire compte casser du Viet en projetant un camp retranché, dans une cuvette à la lisière du Laos, trop loin. Dès le premier assaut, l’espoir change de camp, l’artillerie française est battue, son colonel se suicide. Atterrissages et décollages se révèlent impossibles, ravitaillement et renforts devront être parachutés. La fine fleur de l’armée française est piégée. L’agonie durera 170 jours.
La reconstitution est belle. Schoendoerffer hésite entre le documentaire, qu’il commente en personne, et la fiction. En l’absence d’images de synthèse, les amateurs apprécieront les véritables Traction Avant, 203 et 4CV, les Jeep et GMC, le train, les trois DC3 et les deux faux Gruman F6F-5 Hellcat (des North American T-6 maquillés), jusqu’au clairon, qui sonne juste. Les tenues coloniales blanches sont immaculées, les treillis boueux et tachés de sang.
Le montage alterne les séquences de la Cuvette et de Saigon. Il s’attarde dans la capitale insouciante, ses cercles de jeux où l’on parie sur la chute du camp, ses bars à soldats qui se vident progressivement et l’aéroport où, chaque soir, un contingent embarque. Très vite, nul n’ignore que le voyage sera sans retour, pourtant, les volontaires, parachutistes, légionnaires et cavaliers, ne manquent pas, et ce, jusqu’au dernier jour.
À l’inverse de tant de productions récentes, il n’éprouve pas le besoin d’en rajouter, dans l’horreur ou la romance, le sadisme ou la dénonciation. Il se contente de filmer ce qu’il a vu. On marche, crie, commente. On meurt assez peu. Sa caméra s’attarde néanmoins sur les corps martyrisés et les lâches qui se cachent. Il pleut. Tous pataugent dans la boue. Les détonations sourdes des obus scandent les journées. Il privilégie les combats de nuit, ou dans la brume. De jour, le manque de moyens est plus visible. On ne verra de Viets qu’à la fin, quand la Cuvette a rendu les armes, dans une extraordinaire scène opposant la joie des innombrables vainqueurs à l’abattement des vaincus.
Schoendoerffer est aussi écrivain, ses personnages s’écoutent un peu parler, le ton n’est pas toujours juste. « La mort, c’est le triomphe de la pesanteur, loi du vieil Isaac ». « Que sait-on des morts ? sinon que bientôt on leur ressemblera ? » Cet aspect désuet ne m’est pas désagréable. On prie un peu et on commente trop, à moins que cela ne fut l’inverse, question de point de vue. Le capitaine Jegu de Kerveguen (Patrick Catalifo) s’évertue à d’expliquer au journaliste américain le point de vue d’un soldat de métier. Un professionnel accepte de mourir, mais déteste être gaspillé dans une bataille mal foutue, mal commandée, être réduit à “du pain pour les canards ». Il sautera tout de même, par fierté, pour rejoindre les autres.
Contre les Viets, contre l’ennemi,
Partout où le combat fait signe…
À ceci j’ajoute
Vous l’avez lu dans les lignes précédentes, le réalisateur se penche cette fois-ci non seulement sur un évènement de l’histoire mais aussi sur un épisode de sa vie. Ayant lui-même vécu cette bataille, mais aussi l’emprisonnement à l’issue, on ne peut qu’avoir un regard particulier sur cette fresque cinématographique. Encore une fois, loin des super production (pas que Hollywoodienne) on se retrouve à côtoyer du simple caporal-chef au capitaine qui sont tous dans le même bateau et tous volontaires. Ici on ne voit pas les décideurs… les étoilés… on en parle… on critique (légèrement) mais on ne les voit pas. Encore moins les politiques. Ici P. Schoendoerffer nous montre, une nouvelle fois, la guerre à vue d’homme. Ceux qui y étaient et qui l’ont vécu dans leur chaire.
Il a aussi écrit un livre qui comporte 4 parties :
- 1ère partie : Dien Bien Phu la bataille. Ici, le cinéaste se fait écrivain pour évoquer ce drame collectif.
- 2ème partie : La guerre d’Indochine. Afin de remettre la bataille dans son contexte, le journaliste et écrivain, Jean Noli retrace le déroulement de la guerre d’Indochine, de 1945 à la conférence de Genève.
- 3ème partie : Le projet et l’envie. Le cinéaste parle de la genèse du film mais aussi de son parcours depuis 1952.
- 4ème partie : Reportage photographique. Patrick Chauvel, qui n’en n’est pas à sa première expérience avec son oncle (moment people désolé) a joué le Lieutenant Duroc dans le film. Il a « profité » du moment pour faire un reportage sur le tournage.
PS ; je ne l’ai pas lu.
Enfin, je ne peux m’empêcher de mettre la bande originale du film (ou du moins le titre principal) car il me prend « aux tripes » si vous me passez l’expression dans ce contexte…